Swissmetal Boillat | Le Conseil exécutif répond au comité bernois de pétition de la Boillat

Le gouvernement dit comprendre, mais il n'a pas les moyens d'agir

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Le Journal du Jura
Mercredi 20 décembre 2006
Auteur : Philippe Oudot
Tout en comprenant les préoccupations exprimées dans la pétition, le Conseil exécutif affirme ne pas pouvoir entrer en matière, faute de bases juridiques. De plus, cela ne répond pas à une tâche de l'Etat.
Sur les 14 917 signatures récoltées par la pétition Boillat 2006 (voir Le JdJ de samedi), une grande partie - 6511 - l'ont été dans le canton de Berne et remises, le 26 juin dernier, au conseiller d'Etat Andreas Rickenbacher, directeur de l'Economie publique. La semaine dernière, le Conseil exécutif a répondu par écrit au comité bernois de pétition. Une missive signée par le président Werner Luginbühl et le chancelier Kurt Nuspliger.

D'emblée, le gouvernement assure le comité de pétition qu'il «comprend les inquiétudes (des pétitionnaires) quant à l'avenir de l'usine de la Boillat à Reconvilier». Il rappelle que le canton s'est toujours engagé en faveur du maintien du site et des emplois. Que ce soit dans le cadre de la médiation menée sous la conduite de la Direction de l'économie publique, lors de la première grève de novembre 2004, qui a conduit à la signature du fameux Protocole d'accord. Mais aussi le printemps dernier, en appuyant les démarches du médiateur Rolf Bloch.

Il faudrait modifier la Constitution

S'agissant de l'exigence que le canton exerce un droit de préemption sur les actions Swissmetal, le gouvernement relève que «le canton ne dispose pas d'un tel droit». Comme tout actionnaire, il devrait donc acheter les titres à la Bourse et les payer au prix du marché. Qui plus est, si le canton devait prendre une participation majoritaire dans la société, il devrait tout d'abord créer les bases légales pour le faire. «Comme l'exploitation d'une entreprise industrielle n'est pas une tâche de l'Etat, il faudrait en premier lieu changer la Constitution cantonale», souligne-t-il.

Par ailleurs, le Conseil exécutif constate que «l'achat d'actions ne donne pas de droits sur des parties précises de l'entreprise». Cela signifie donc que même en acquérant «des actions à concurrence de la valeur de l'usine de la Boillat, il ne pourrait pas faire valoir de droits sur cette usine». En fait, une annulation des droits juridiques de Swissmetal sur son usine de Reconvilier équivaudrait à une expropriation partielle. Or, il n'existe pas de bases légales pour procéder à une telle opération, constate le gouvernement. De toute façon, poursuit-il, le canton, via son administration, ne dispose pas du savoir-faire pour gérer une entreprise industrielle.

Quant à la demande de créer une société d'utilité publique, le gouvernement relève que «la Boillat est une entreprise de production industrielle qui ne remplit pas les critères ad hoc», raison pour laquelle il ne serait pas possible de transformer l'entreprise en institution d'utilité publique.

Pour toutes les raisons mentionnées ci-dessus, le Conseil exécutif fait donc savoir au comité qu'il ne peut satisfaire aux exigences de la pétition, «la gestion d'une entreprise industrielle n'étant pas du ressort du canton».

Ingérence massive

La deuxième partie de la pétition prie les autorités des cantons d'intervenir auprès de la Confédération pour modifier le droit des sociétés. Elle demande plus précisément «d'introduire la faculté des organes politiques du pays de protéger certaines entreprises et de les soustraire à la désorganisation économique consécutive à la maladresse ou au souci de lucre de leur propriétaire». Pour le Conseil d'Etat, il s'agirait là d'«une ingérence massive dans le droit de propriété qui n'est pas souhaitable». Comment définir la notion d'exercice abusif de la propriété? Comment dédommager l'atteinte à la propriété? Autant de questions complexes auxquelles il serait très difficile de répondre.

Pour le gouvernement, de telles mesures aboutiraient à de longs conflits juridiques. D'autant que le canton ne pourrait toucher au statut juridique d'une entreprise sans verser d'indemnités. Dans ce contexte, «l'initiative parlementaire réclamée dans la pétition n'apporterait pas d'avantages au site économique bernois». Et de rappeler que les initiatives cantonales sont du ressort du Grand Conseil, raison pour laquelle il transmettra la pétition au parlement. «Ce dernier décidera s'il souhaite déposer une initiative cantonale comme demandé dans la pétition», conclut le gouvernement.

«Il faut un débat de fond»

Ancien président de la délégation du personnel et porte-parole du mouvement de lutte, Nicolas Wuillemin ne se dit guère surpris de la prise de position du Conseil exécutif. En l'état actuel de la législation, le gouvernement n'avait pas vraiment le choix. Cela dit, le membre du comité de pétition espère que le sujet prêtera à un débat de fond lorsque la question du dépôt d'une initiative cantonale sera à l'ordre du jour d'une prochaine session du Grand Conseil. Sans trop se faire d'illusions sur l'issue des débats, il espère néanmoins que les députés seront sensibles aux revendications légitimes des pétitionnaires.



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Comités cantonaux de pétition Boillat 2006
Actualisé le 20.12.06 par webmaster
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