Swissmetal Boillat | Soupe populaire des «Femmes en colère»

La Boillat n'est plus que l'ombre d'elle-même

Source et copyright :
Le Journal du Jura
Samedi 18 novembre 2006
Auteur : Philippe Oudot
La bruine d'hier soir n'a pas découragé les sympathisants de la Boillat, venus témoigner leur solidarité et dénoncer l'incurie de la direction de Swissmetal, à l'invitation du collectif des «Femmes en colère».
Il y a deux ans, le 16 novembre 2004, éclatait la première grève de la Boillat. Poussé à bout, le personnel avait stoppé les machines afin de dénoncer la politique suicidaire de la direction de Swissmetal. Le mouvement de grève avait aussitôt reçu le soutien de toute la région et d'une bonne partie des clients, inquiets de la stratégie du groupe.

Hier soir, 250 à 300 personnes se sont retrouvées sur le parking de la Boillat, derrière l'usine 1, à l'invitation du collectif des «Femmes en colère», qui avaient organisé pour l'occasion une soupe populaire. Collaborateurs licenciés, sympathisants et quelques courageux employés qui travaillent encore dans l'usine se sont ainsi rassemblés dans une ambiance conviviale malgré la bruine et ont ainsi partagé un moment d'amitié.

Si l'heure était aux souvenirs et aux moments forts de la lutte, chacun soulignait que la situation continue de se détériorer. «C'est toujours pire. On se demande bien quand Swissmetal va s'effondrer, car on ne peut pas continuer de travailler ainsi», soulignait un employé qui travaille encore dans l'usine. Et un collègue de renchérir en constatant que pour avoir des liquidités, la direction de Swissmetal n'hésite pas à vendre de la matière première ou des ébauches. «On ne peut pas travailler sérieusement dans de telles conditions...» «Et dire que le cours de l'action Swissmetal a doublé ces dernier mois et avoisine les 30 fr. C'est vraiment incompréhensible!», ajoutait un ancien gréviste.

Une lutte exemplaire


Membre de la commission d'entreprise, Maria Wuillemin a prononcé un discours enflammé au nom des «Femmes en colère». Rappelant que le personnel s'est battu avec détermination pour assurer la pérennité de son outil de travail, elle a souligné que par deux fois, la lutte a été menée «de manière extraordinaire, exemplaire, irréprochable».

Toutefois, malgré ce formidable engagement, la Boillat est devenue méconnaissable. L'oratrice a fustigé «l'incompétence de la direction et du conseil d'administration qui n'offre aucune perspective d'avenir industriel et économique» pour le site de Reconvilier.

Régime de terreur

Elle a dénoncé «le régime totalitaire et de terreur mis en place par le nouvel encadrement dont l'incompétence dans tous les domaines est flagrante et manifeste». Les salariés qui osent encore s'exprimer sont licenciés sans autre forme de procès. Ils sont remplacés «par des ouvriers intérimaires ou frontaliers sans aucune expérience ni formation». Quant aux anciens qui travaillent encore à la Boillat et qui assistent à la déliquescence du joyau que fut la Boillat, «ils sont fatigués, démotivés et résignés».

Aujourd'hui, a poursuivi Maria Wuillemin, les principales installations, vitales pour l'entreprise, ne fonctionnent pas ou mal. A court de matières premières, les machines sont à l'arrêt. Echaudés par la piètre qualité des produits que Swissmetal leur propose, les clients ont perdu confiance et cherchent d'autres fournisseurs ou se reconvertissent dans de nouveaux alliages non cuivreux. Résultat: «Les entrées de commandes et la valeur ajoutée brute sont en chute libre».

Pourtant, la direction continue de dire que tout va bien et que la situation se normalise - «ce qui n'est que pure propagande mensongère». Et si le combat des Boillats n'a pas fait reculer Swissmetal, «notre courageuse opposition a fortement grippé la machine destructrice mise en place par nos dirigeants».

Et de conclure en constatant que «toutes les dictatures ont toujours fini par tomber quand elles étaient combattues. Continuons de nous battre contre le monde dictatorial de la finance. A la Boillat, nous avons démontré qu'il était possible et nécessaire de le faire. Nous avons représenté une grande force, mais encore insuffisante (...) mais lorsque les travailleurs agiront ensemble, ce jour-là, nous gagnerons».


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Actualisé le 19.12.06 par webmaster
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