Le restaurant d’entreprise de la Boillat fermera ses portes mardi

Dick et Hélène Schmieman, tenanciers de La Lingotière de 1963 à 1994, se souviennent

Le Quotidien Jurassien
Vendredi 15 décembre 2006
Auteur : Christophe Winistoerfer
L’incompréhension est grande chez Dick et Hélène Schmieman, gérants pendant trente et un ans du restaurant d’entreprise de la Boillat, à Reconvilier, qui ont appris à la fin du mois dernier, comme les employés de l’entreprise et le reste de la région, que La Lingotière fermera définitivement ses fourneaux mardi 19 décembre prochain.
On le savait depuis bientôt deux ans, les dirigeants de Swissmetal cherchaient à dénoncer le contrat qui les liait à la société DSR, exploitant La Lingotière, le groupe métallurgique faisant ainsi une économie de l’ordre de 100 000 francs. Le restaurant d’entreprise aurait d’ailleurs dû fermer en août passé. On tenta alors de trouver une solution, sans succès.

Dès mercredi prochain, les employés qui le désirent pourront prendre leur repas à un prix modique au Restaurant du Midi, toujours à Reconvilier. Swissmetal participera aux coûts du repas à hauteur de 2 francs.

C’est une page qui se tourne dans la vie de la Boillat. C’est aussi un crève-cœur pour les anciens tenanciers Dick et Hélène Schmieman, véritables institutions dans l’institution. De 1963 à 1994, ce couple sympathique n’a pas compté ses heures de travail au service des «métallos».

Ouvert six jours sur sept

A La Lingotière, ils préparaient trois repas par jour, six jours sur sept, à l’exception du samedi où ils arrêtaient après le repas de midi. Dick se levait le premier vers 5 h 30, car 25 à 30 ouvriers prenaient leur petit-déjeuner vers 6 h 30. Peu de temps après, Hélène arrivait également. Sa principale tâche du matin: remplir le chariot de limonade, de thé, de petits pains, de chocolats et cigarettes, puis passer auprès des employés dans toute l’usine.

Pendant ce temps, Dick préparait le repas de midi, servi sur plats par son épouse, pour une centaine de personnes qui arrivaient en deux vagues, à 11 h 30, puis à 13 h, mais aussi une quarantaine de mets à emporter. En 1963, La Lingotière offrait un menu du jour pour un prix avoisinant 2 fr. 70. En 1994, le menu du jour valait 8 fr. et quatre autres menus étaient proposés à la carte.

Dick allait ensuite se reposer un peu. Hélène entamait alors son deuxième passage dans les ateliers. Puis, vers 16 h, Dick revenait et débutait la préparation du souper pour une vingtaine d’ouvriers. Sa journée s’achevait à 19 h 30.

L’ambiance était excellente à La Lingotière où la direction ne rechignait pas à venir dîner. Ainsi, tous les lundis ou presque, les neuf directeurs avaient pris l’habitude de manger au restaurant de l’entreprise. «On les appelaient les lundistes», se rappelle Dick: «Ils s’installaient dans une petite pièce attenante à la grande salle et s’attardaient parfois longtemps à refaire le monde et l’entreprise».

DSR: Dick Schmieman Restaurant

L’alcool était interdit à l’époque dans les restaurants DSR. Pourtant on en trouvait parfois à La Lingotière. Lorsqu’on lui en faisait la remarque, Dick répondait dans un sourire: «Vous n’êtes pas chez DSR, ici, vous êtes chez Dick Schmieman Restaurant!»

La vie de l’entreprise et de son restaurant ne s’arrêtait toutefois pas aux murs de La Lingotière. Une fois par année se déroulait le pique-nique de la Boillat. Tous les employés, et leur famille, étaient conviés à ce grand raout. Jusqu’à 600 personnes se donnaient rendez-vous dans les prés au-dessus de Reconvilier. Dick préparait… 300 litres de soupe aux pois, 150 kg de jambon et autant de pommes de terre, le tout servi en pleine nature!

Mais les Schmieman n’en restaient pas là. Ils cuisinaient lors de nombreuses réunions de sociétés, comme le Nouvel-An du Football-Club ou le stand de la Société de gymnastique à la Foire de Chaindon pour lequel ils préparaient 150 litres de farce à vol-au-vent. Ils iront même, durant quatre ans à la fin des années septante, jusqu’à sacrifier deux semaines de leurs vacances d’été pour faire la popote aux colonies de vacances.

Une vie heureuse

Autant de souvenirs que ce Néerlandais et cette Gruyérienne d’origine, aujourd’hui Jurassiens de cœur, relatent avec un évident plaisir. La fermeture de La Lingotière leur fait d’autant plus mal qu’ils y ont passé une vie heureuse. «Dans le temps, c’était une famille, y compris la direction, toujours amicale. Les tensions sont arrivées peu avant notre départ à la retraite», soupirent-ils en chœur.


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