Swissmetal Boillat | N. Wuillemin à propos des tensions avec Unia

«Unia devait venir nous faire part de sa position, mais il n'en a rien été»

Source : Journal du Jura
Date : jeudi 29 juin 2006
Auteur : Philippe Oudot
Copyright : Le Journal du Jura
Après la syndicaliste Fabienne Blanc-Kühn, c'est à Nicolas Wuillemin, leader du mouvement de lutte de la Boillat, de donner son point de vue sur les tensions entre le personnel et le syndicat Unia.
Dans son édition de samedi dernier, Le JdJ a publié une interview de Fabienne Blanc-Kühn, secrétaire centrale du syndicat Unia, responsable du secteur industrie. Elle y exposait la position d'Unia et s'expliquait sur les dissensions apparues entre le personnel et le syndicat. Elle minimisait les tensions et justifiait notamment la position d'Unia dans la médiation. Ses propos ont suscité de vives réactions du côté de Reconvilier. Le point avec Nicolas Wuillemin, figure emblématique du mouvement de lutte des Boillats.

En préambule, celui-ci dit regretter ce qui se passe mais estime qu'il est de son devoir de remettre l'église au milieu du village. En effet, souligne-t-il, le malaise est bien plus profond que Fabienne Blanc-Kühn le laisse entendre. «Contrairement à ce qu'elle dit, ce n'est pas en raison de la chaleur ou du match Suisse-Togo que beaucoup de collègues sont sortis lors de notre assemblée d'il y a 10 jours, quand Renzo Ambrosetti a pris la parole... Les tensions ont commencé bien avant, lorsque Unia a fait pression sur le personnel à fin février pour le pousser à entrer en négociation.» Le syndicat avait en effet clairement laissé entendre aux grévistes qu'il ne pourrait plus les soutenir financièrement s'ils poursuivaient leur mouvement. De nombreux travailleurs se sont alors sentis lâchés par Unia, d'autant que le syndicat avait tenu auparavant un tout autre discours.

Pour Nicolas Wuillemin, les responsables d'Unia ont commis une grosse erreur en ne prenant pas la mesure du fossé qui s'est creusé. Et de souligner que ce ressentiment n'est pas propre aux employés de la Boillat. «Je peux vous dire que de nombreux amis syndicalistes du pays m'ont clairement dit qu'ils ne comprenaient pas l'attitude d'Unia dans cette affaire.»

Rien compris

En réalité, poursuit-il, «le syndicat ne s'est pas donné les armes pour nous accompagner dans le conflit qui était le nôtre. Il n'a pas compris notre détermination à aller jusqu'au bout pour défendre la pérennité de la Boillat.» Mais contrairement à ce qui se dit parfois, l'objectif des commissions n'a jamais été de pousser Swissmetal à la faillite: «Au contraire, notre but a toujours été d'assurer un avenir à la Boillat.»
Dans le conflit de la Boillat, analyse Nicolas Wuillemin, le syndicat s'est retrouvé pris au piège en devant mener de front deux négociations aux objectifs inconciliables. La première, avec le personnel de la Boillat qui, en utilisant l'arme de la grève, exigeait le maintien de toutes les activités à Reconvilier. Et la seconde, avec Swissmetal et Swissmem (l'association patronale faîtière de la branche), qui refusaient de négocier sous la pression de cette grève qu'ils jugeaient illégale. «Unia a pensé qu'il pourrait négocier en notre nom, ce qui n'était pas possible.»

Absence de concertation

S'agissant des propositions de l'expert acceptées par le syndicat, Nicolas Wuillemin constate que Swissmetal et Unia ont eu connaissance des propositions de l'expert avant la séance de médiation, mais pas la délégation du personnel. «Nous sommes arrivés une heure avant le début de la séance. Il aurait été logique qu'Unia vienne nous en informer et nous fasse part de sa position. Mais il n'en a rien été.»

Au cours de cette séance de médiation, l'expert Jürg Müller a donné lecture de ses propositions. Friedrich Sauerländer, président du conseil d'administration, a annoncé que Swissmetal s'y ralliait. «De notre côté, nous attendions que l'expert mette clairement le doigt sur les responsabilités de Swissmetal. Comme ses propositions nous semblaient ne pas aller assez loin et ne pas répondre aux attentes du personnel, nous avons demandé une interruption de séance pour en discuter entre nous. Unia nous a laissés seuls. Ensuite, quand nous avons annoncé à Rolf Bloch que nous refusions de nous prononcer et que c'était au personnel de le faire, Renzo Ambrosetti a asséné qu'Unia les acceptait. Cette absence de concertation de sa part est inacceptable!», dénonce Nicolas Wuillemin.

Il précise encore que contrairement à certains bruits, la décision de la délégation à la médiation a été prise à l'unanimité de ses neuf membres, et pas simplement à la majorité. Et la délégation a arrêté sa position non pas parce que Swissmetal et Unia avaient eu connaissance des conclusions du rapport de l'expert avant eux, mais bien parce que ses propositions n'offraient pas de garanties suffisantes. «Les contre-propositions que nous avons décidé d'adresser à l'expert Jürg Müller - malgré la rupture de la médiation - ne sont pas fantaisistes. Nous demandons simplement des précisions et des garanties sur les points qu'il proposait.»

Avenir difficile

Comme l'explique Nicolas Wuillemin, ce que ce qui a fait la force du mouvement à la Boillat, c'est que tout s'est toujours fait dans la transparence. «Quitte à s'engueuler un bon coup quand on n'est pas d'accord.» Aussi estime-t-il que ce qui s'est passé lors de la médiation risque d'avoir des conséquences à long terme sur les relations avec le syndicat - «ce qu'un vieux militant comme moi regrette infiniment». Dans l'usine, en effet, le ressentiment contre Unia est très fort. «Certains comparent carrément Ambrosetti à Hellweg en en arrivent à traiter les membres des commissions de complices du syndicat...» Voilà qui augure de lendemains difficiles.


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