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Projection du film La Boillat Vivra ! à MoutierDu fol espoir à la désillusion
C'est que depuis qu'il dirige Swissmetal, Martin Hellweg a brisé ce lien et n'a aucun égard pour son personnel: «On a très vite compris qu'il se foutait de notre gueule», assène un employé. La crise a débuté en novembre 2004, avec le licenciement du directeur de l'usine. Après 10 jours de grève, le conflit prend fin avec la signature d'un protocole d'accord dans lequel Swissmetal s'engage à développer le site de Reconvilier. Mais les promesses n'engagent que ceux qui veulent bien y croire et Hellweg annonce un an plus tard qu'il veut fermer la fonderie et les presses. Tout dialogue étant impossible, les Boillats n'ont d'autre choix que de se remettre en grève. C'est la révolte de ces métallos qui se battent pour sauver leur outil de travail que filme Daniel Künzi. Au départ, ils espèrent bien faire entendre raison à leur patron. D'autant qu'ils ont l'appui de toute la région. En février, une manif rassemble 10 000 personnes pour soutenir les grévistes. Le fonds de solidarité recueille des dons tous azimuts - il y aura plus d'un million de francs à la fin de la grève. Le cinéaste promène sa caméra dans l'usine, recueille des confidences, filme les spectacles qui s'y déroulent. Il rappelle en images le culte organisé un dimanche dans l'usine 1: «Notre place est d'être au côté des ouvriers pour les écouter et les soutenir», explique le pasteur Balz. Mais plus le temps passe, plus l'inquiétude devient palpable. D'autant que Martin Hellweg enchaîne les provocations: rachat de Busch-Jaeger, qu'il dit capable de produire l'assortiment de la Boillat; licenciement de Nicolas Wuillemin (porte-parole des grévistes), puis de tous les cadres. Et quand Joseph Deiss nomme le médiateur Rolf Bloch pour tenter de sortir de l'impasse, Hellweg jette de l'huile sur le feu en annonçant le licenciement de 112 personnes. L'optimisme des débuts fait place à la fatigue, la lassitude. On y croit certes encore, quand Nicolas Wuillemin bat le rappel des troupes. Et lorsque la cagnotte de l'Euromillions déborde, on rêve de toucher le jackpot pour racheter la boîte, au nez et à la barbe du patron. L'espoir devient réel quand Hellweg évoque une vente possible de la Boillat, avant de se raviser, jurant qu'il ne la lâchera jamais. Du côté d'Unia, l'inquiétude monte aussi: «Après dix jours de grève, les risques de perdre augmentent», constate le syndicaliste André Daguet. Daniel Künzi montre que le découragement gagne les combattants. L'impasse étant totale, le personnel doit se prononcer sur la reprise du travail - condition à la poursuite de la médiation. La mort dans l'âme, la majorité s'y résigne, non sans fulminer contre le syndicat, accusé de lâcher les grévistes en les poussant à voter oui. La reprise du travail se fait dans le plus grand chaos, alors que la médiation piétine. Finalement, Hellweg tombe le masque en claquant la porte à la médiation à la veille de l'assemblée générale. Un cénacle qui approuve la stratégie hellwégienne à 99,9% des voix. Dans un contexte aussi noir, le jeu en valait-il vraiment la chandelle? La réponse, c'est Nicolas Wuillemin qui la donne à la poignée de manifestants venus célébrer le 1er anniversaire de la grève: «La défaite, c'est quand la flamme est morte, quand l'homme ne se bat plus pour sa dignité.» Sentiment d'impuissanceAprès la projection, Nicolas Wuillemin a répondu à quelques questions du public. Il a fait part d'un profond sentiment d'impuissance, car après 30 jours de grève, la direction n'a pas fait la moindre concession, refusé toute ouverture. Aujourd'hui, personne ne sait ce qu'il faudrait faire si un tel conflit éclatait à nouveau.Le plus grave, désormais, c'est la question de la légalité de la grève que devra trancher un tribunal. A ses yeux, on ne peut pas demander aux ouvriers de respecter la paix du travail et en même temps leur demander de se battre sans les armes nécessaires, à savoir le droit de grève. «Si celle-ci devait être déclarée illégale, ce serait une catastrophe pour le monde ouvrier pour les 20 à 30 ans à venir», a-t-il constaté. Dans tous les cas, il serait temps que le mouvement syndical s'engage enfin dans une politique de rupture. Cela dit, si Unia n'est pas exempt de reproches et doit faire son autocritique, il a tout de même relevé que les syndicats sont nécessaires et que c'est aussi aux ouvriers à se montrer plus exigeants. Mais face à cette politique de consensus mou d'Unia, une personne dans la salle a appelé à créer de véritables syndicats de lutte alternatifs Article précédent | Article suivant | Sommaire des articles Sur le même sujet :Portraits :
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Actualisé le 02.05.07 par webmaster
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