Swissmetal Boillat | Manifestation nationale des 10 et 11 juin

Un rassemblement festif pour raviver la flamme

Source : Journal du Jura
Date : vendredi 2 juin 2006
Auteur : Philippe Oudot
Copyright : Le Journal du Jura
Le conflit de la Boillat ne fait plus les gros titres, mais il n'est de loin pas réglé, en dépit des messages lénifiants de Swissmetal. Pour le rappeler, une grande manif nationale sera organisée les 10 et 11 juin prochains.

Depuis plus de quatre mois, les employés de Swissmetal sont entrés en résistance pour tenter de sauver leur outil de production. Et si le travail a officiellement repris après un mois de grève, la situation reste toujours des plus chaotiques. La direction essaie de faire croire que le conflit est en passe d'être réglé, que les choses se normalisent, que les clients sont à nouveau livrés et satisfaits. «Or, tout cela est faux. En fait, la situation est bien plus grave qu'on ne le pense et l'avenir est encore plus hypothéqué qu'il y a quelque temps», a asséné hier Nicolas Wuillemin, porte-parole des grévistes et président de la représentation des employés, licencié par Swissmetal durant la grève et interdit de site. Des propos tenus dans le cadre de la présentation de la manifestation nationale des 10 et 11 juin prochains.

Cette manifestation a justement pour objectif de rappeler à l'opinion publique et au monde politique la gravité de la situation. La direction fanfaronne en annonçant le réengagement de 30 à 40 personnes. Mais en même temps, une bonne partie des 111 personnes licenciées ont définitivement quitté l'usine mercredi 31 mai, si bien qu'il n'y a pas plus de monde à la production. «Le travail continue d'être mal organisé, mal fait, faute de matière de qualité, et les clients continuent d'attendre pour être livrés, avec des produits qui ne leur donnent pas satisfaction», a poursuivi Nicolas Wuillemin.
Commandes ventilées sur les autres sites

Et la situation ne va sans doute pas s'améliorer ces prochains temps, a-t-il poursuivi, en brandissant un document interne de 23 pages où figurent les commandes que des clients ont passées à la Boillat, mais qui ont été transmises par la direction à Dornach ou chez Busch-Jaeger, à Lüdenscheid. Et si, pour le moment, il s'agit principalement de produits plus ou moins standards, Nicolas Wuillemin s'est dit persuadé que ces produits cesseront définitivement d'être fabriqués à la Boillat dès qu'ils pourront être homologués dans l'une ou l'autre des deux usines.

D'ailleurs, quand Swissmetal affirme vouloir «orienter l'usine sur les produits exclusifs que seule la Boillat peut produire dans cette qualité, cette forme et cette dimension» (citation du comité de gestion de Swissmetal, n.d.l.r.), Nicolas Wuillemin assure que c'est faux puisque, aujourd'hui déjà, de la matière utilisée pour les alliages destinés aux instruments d'écriture est envoyée à Lüdenscheid, alors que cette usine n'est pas en mesure de couler ces alliages, de les presser et de fabriquer ces produits. C'est d'ailleurs bien pour cette raison que Swissmetal envisage de déplacer la fameuse machine «Schumag 6» (utilisée notamment pour les pointes de stylos, n.d.l.r.), non pas à Dornach, mais chez Busch-Jaeger. La direction s'est d'ailleurs déjà approchée d'un des opérateurs pour lui demander s'il était prêt à aller travailler à Lüdenscheid...
Un lapsus qui n'en était pas un

Bref, pour Nicolas Wuillemin, tout cela démontre que contrairement à ses promesses, Swissmetal entend bel et bien démanteler la Boillat: et de rappeler qu'en présentant sa «nouvelle stratégie» l'automne dernier, la direction avait dit vouloir faire de l'usine de Reconvilier un atelier de finissage avec 200 voire 250 collaborateurs. Or, a-t-il constaté, les décisions actuelles ne vont pas du tout dans cette direction. «En fait, quand Sam Furrer avait affirmé à la télévision qu'il resterait environ 60 personnes dans l'usine de Reconvilier, ce n'était visiblement pas un lapsus!»

D'ailleurs, la direction n'est pas à une contradiction près: dans le dernier numéro de son journal interne «Boillat Hebdo», Jean-Pierre Tardent, responsable de l'innovation, vante les premiers succès commerciaux du nouvel alliage NP6 (destiné aux connecteurs de haute performance). Or, dans un courrier interne adressé aux cadres quelques jours plus tôt, la direction les informait qu'il ne fallait pas accepter de commandes avant l'été, ce produit étant encore en développement et difficile à réaliser. Et ce sera d'autant plus difficile que tous les cadres du secteur Recherche et Développement de Boillat qui y travaillaient ont été licenciés!

Et si, après plus de quatre mois de lutte, un certain nombre d'employés cèdent au découragement, Nicolas Wuillemin estime que ce n'est pas le moment de baisser la garde, bien au contraire. Tout d'abord, parce que les conclusions du rapport tant attendu de l'expert iront très certainement dans le sens que les revendications des Boillats. Reste à savoir ce qu'en fera la direction. Ensuite, parce que, après avoir pillé le stock de matières à la Boillat, la direction risque fort de vouloir déplacer des machines. «Il faudra être particulièrement vigilants pendant la période des vacances d'été, et voir comment réagir le cas échéant», a-t-il souligné. Swissmetal est donc averti...

Débats, discours et animations diverses

La manifestation comportera un volet politique et un volet plus festif. Côté politique, un forum sur le thème «Désindustrialisation, est-ce une fatalité? Problèmes régionaux, quelles réponses?» se tiendra samedi matin à 10 h sous une tente dressée devant l'uZine 3. Cette table ronde réunira quatre participants: Pierre-Yves Maillard, conseiller d'Etat vaudois et vice-président du PSS; Charles-André Udry, économiste; Jean-Pierre Rérat, coprésident de la CEP et député radical, et Sylvain Astier, député radical.

Le rassemblement officiel aura lieu l'après-midi sur la place derrière l'usine 1. Plusieurs orateurs sont annoncés: Jean-Claude Rennwald (conseiller national, PS, Jura); son collègue Josef Zisyadis (POP, Vaud); Maxime Zuber (député-maire PSA de Moutier et membre du comité de soutien à la Boillat, ainsi qu'un représentant des employés de la Boillat. Le dimanche, un débat abordera le thème de la mondialisation et des délocalisations, à la lumière de ce qui se passe à la Boillat.

Pour la partie musicale, le chansonnier Thierry Romanens est d'ores et déjà annoncé, a indiqué Fred Charpié, président du comité d'organisation et membre fondateur de l'uZine 3. La liste sera complétée sur le site www.laboillat.ch/manifestation/fr/programme au fur et à mesure de la signature des contrats. Différents stands et animations donneront un caractère convivial à la manifestation. Quant au mouvement des «femmes en colère», il invitera les manifestants à laisser un message qui sera ensuite consigné dans un livre d'or témoignant de la lutte de la Boillat.

Quant à la pétition qui demande au canton de Berne d'exercer un droit de préemption sur les actions de la Boillat afin de créer une société d'utilité publique, la récolte des signatures se poursuit. A ce jour, il y en a plus de 12 000 déjà enregistrées. Dans un premier temps, les organisateurs avaient prévu de la remettre à un membre du gouvernement à Reconvilier, mais finalement, cela se fera à fin juin, si bien que d'ici là, la récolte de signatures se poursuit.


Article précédent | Article suivant | Sommaire des articles
Actualisé le 19.11.06 par webmaster
Haut de la page | Page précédente | 'Imprimer la page dans un format adapté à l'imprimante