Swissmetal Boillat | André Daguet tire les enseignements de la grève

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Le Journal du Jura
Vendredi 23 février 2007
Auteur : Philippe Oudot
Il y a tout juste une année, les employés de la Boillat décidaient, la mort dans l'âme, de suspendre le mouvement de grève entamé le 25 janvier. Membre du comité directeur d'Unia, André Daguet revient sur le conflit.
La grève de la Boillat est sans doute un des conflits du travail les plus durs qu'ait connu la Suisse. Pendant 30 jours, le personnel et les cadres ont tout fait pour tenter de ramener la direction et le conseil d'administration de Swissmetal à la raison, jugeant suicidaire la stratégie du groupe pour l'usine de Reconvilier - et plus largement pour le groupe tout entier. En vain.

Finalement, après un mois de lutte sans merci, les employés acceptaient de suspendre leur mouvement. Membre du comité directeur d'Unia, André Daguet constate qu'«au vu du blocage de la situation, la suspension de la grève et la procédure de médiation conduite par Rolf Bloch étaient la seule alternative». Les discussions ont été très laborieuses, la direction de Swissmetal se montrant particulièrement intransigeante.

Mais l'analyse de l'expert industriel Jürg Müller aura au moins démontré qu'en licenciant tous les cadres et un tiers du personnel, Martin Hellweg était pleinement responsable de la gabegie sur le site de Reconvilier à la reprise du travail. Un constat évidemment inacceptable pour Swissmetal, pour qui les grévistes sont forcément les seuls responsables du chaos à la Boillat. Refusant de voir la réalité en face, Swissmetal n'a eu d'autre choix que de rompre la médiation de manière unilatérale.

Avec le recul, André Daguet constate que la grève de l'an dernier était quasi programmée: la direction n'a en effet jamais respecté le protocole d'accord signé sous l'égide d'Elisabeth Zölch, alors directrice de l'Economie publique du canton de Berne, et qui avait mis fin à la première grève de novembre 2004. L'annonce de la concentration des activités de fonderie, en novembre 2005, aura encore renforcé les craintes des Boillats pour l'avenir du site de Reconvilier. Face à une direction qui refusait toute discussion, la grève était donc inévitable.

Et de mettre en évidence l'extrême complexité de ce conflit avec, d'un côté, une direction intransigeante soutenue par des actionnaires dépourvus de tout intérêt industriel et qui ne cherchent que des profits à court terme. Et de l'autre, des employés et des cadres unis pour défendre leur outil de production, avec le soutien de toute une région et de la plupart de leurs clients.

Il constate par ailleurs que si les employés ont bel et bien suspendu leur mouvement il y a une année, le conflit n'est pas résolu pour autant. Tant s'en faut. Le tribunal arbitral prévu par la CCT devra se prononcer sur le plan social exigé par Unia et les commissions. Des discussions se poursuivent concernant le paiement d'heures que Swissmetal a déduites des salaires lors de la reprise du travail. D'autres encore portent sur les modalités d'un plan social pour les employés qui perdront leur travail dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie de Swissmetal.

Une plainte sans objet

En décembre, Swissmetal a dit vouloir réclamer à Unia entre 5 et 10 mios de francs au titre de dommages et intérêts, avant de suspendre provisoirement la procédure. Pour André Daguet, cette manœuvre de diversion de Swissmetal vise à anéantir le droit de grève. Mais le syndicaliste est persuadé que la démarche du groupe n'a guère de chances d'aboutir. Et de rappeler que la direction a piétiné à plusieurs reprises ses engagements, et qu'elle n'a donc pas de leçons à donner. Il note par ailleurs que la grève a été décidée spontanément par les employés, qu'Unia ne leur a apporté son soutien qu'après coup et ne peut donc pas être tenu pour responsable De plus, le syndicat a cherché des solutions pragmatiques pour résoudre le conflit. De plus, au vu des conclusions de l'expert industriel Jürg Müller, pour qui la direction est responsable de la débâcle, il y a peu de chances pour que Swissmetal obtienne gain de cause.

Les dates-clés du conflit

Automne 2003 : Martin Hellweg nommé CEO.
Eté 2004 : Refinancement du groupe.
16 novembre 2004 : 1ère grève.
8 novembre 2005 : Annonce de la stratégie qui condamne la fonderie de la Boillat.
25 janvier 2006 : 2e grève.
23 fév. 2006 : Grève suspendue.
27 juin 2006 : Swissmetal met fin à la médiation.



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Actualisé le 23.02.07 par webmaster
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