Swissmetal Boillat | Premec prend ses dispositions

«Nous nous préparons à nous passer de Swissmetal»

Source : Journal du Jura
Date : mercredi 19 juillet 2006
Auteur : Philippe Oudot
Copyright : Journal du Jura
Cliente de la Boillat, Premec est en train de réorienter sa production afin d'assurer son avenir. Impossible en effet de dépendre des promesses de livraisons fantaisistes de la direction de Swissmetal.
Premec SA est un des gros clients de la Boillat, et cela depuis des décennies. Spécialisée dans les instruments d'écriture, cette entreprise tessinoise «consomme» quelque 50 tonnes d'alliages Boillat par semaine. En fait, l'usine de Reconvilier livre à Premec des lopins, c'est-à-dire des ébauches de pointes de stylo. Ça, c'était à l'époque où la Boillat fonctionnait correctement.

Mais depuis la reprise du travail après la grève et sous la direction du nouvel encadrement, Premec n'est plus livré qu'au compte-gouttes. Son président Giorgio Pagani avait d'ailleurs lancé un cri d'alarme en plein SIAMS, en mai dernier, affirmant que l'incapacité de Swissmetal d'honorer les livraisons mettait sérieusement en danger son entreprise.

Des lopins maison

Depuis, la situation ne s'est pas vraiment arrangée. A tel point que la maison Premec a été bien obligée de prendre ses dispositions. Premièrement, elle a reconstitué un département lopins. A l'origine, ces ébauches étaient fabriquées sur des machines au siège de l'entreprise tessinoise. Par la suite, les deux partenaires - «nous avions en effet tissé des liens de confiance très solides» - avaient trouvé un accord, la Boillat rachetant ces machines pour livrer directement les lopins à Premec. «Pour faire face à la situation chaotique actuelle, nous avons donc racheté un parc de machines neuves», explique Giorgio Pagani.

Depuis fin juin, Premec ne commande donc plus de lopins, mais uniquement du fil, et effectue elle-même la fabrication des ébauches. Et comme Swissmetal est incapable de livrer en temps et en quantité voulue la marchandise souhaitée, la société tessinoise a aussi dû diversifier ses fournisseurs. Tâche très difficile, quand on sait que la Boillat était, et de loin, le leader dans ce domaine. Mais finalement, Premec en a trouvé un en Allemagne.

Des pointes d'acier

Mais ce n'est pas tout. Premec a également décidé de réorienter sa production. «A l'avenir, les pointes en maillechort ne représenteront plus qu'un tiers de notre production. Pour les deux autres tiers, nous avons choisi l'acier inox», explique Giorgio Pagani. Un choix qui implique non seulement une réorganisation totale, mais également un changement de technologie, car les deux matières s'usinent de manière totalement différente. De plus, pour arriver à un produit comparable, il faut encore améliorer les performances des pointes d'acier, mettre au point de nouvelles encres, adaptées pour ce type de métal. Un processus qui est encore en cours. Autant dire qu'il s'agit là d'une véritable révolution.

En fait, l'explosion des prix du cuivre (et donc du maillechort) ont aussi facilité cette transition, souligne notre interlocuteur. Avant, une pointe en acier coûtait au moins 10% de plus à la production, avec une productivité à l'usinage inférieure de 20%: l'acier se travaille en effet à des vitesses moins élevées que le maillechort. Pour pallier cet inconvénient, les collaborateurs de ce département de Premec travaillent désormais 24 heures sur 24 en trois équipes.

A l'avenir, Premec pourra donc être totalement indépendant de Swissmetal, puisque l'entreprise a trouvé un fournisseur en Allemagne pour ses alliages de maillechort, et que ses pointes d'acier viendront du Japon. Ce qui pose d'autres problèmes en matière de livraison, car on ne travaille pas avec un fournisseur situé à 300 km comme Boillat avec un qui se situe à 10 000 km. La gestion des stocks est totalement différente, car la marchandise met trois mois pour arriver. De plus, souligne-t-il, il va encore falloir convaincre le marché de la compétitivité de ce nouveau produit.

Cela signifie-t-il que Premec va lâcher Swissmetal? La question ne se pose pas ainsi, rétorque notre interlocuteur, car s'il y a un lâcheur dans cette histoire, c'est bien Swissmetal. Cela dit, Premec a encore d'importantes commandes chez Swissmetal et espère bien que le groupe de Martin Hellweg sera capable de les honorer. Pour faire face à ses échéances, Premec a en effet dû puiser dans ses stocks d'ébauches et de produits finis qui sont aujourd'hui à sec. Il va donc falloir les reconstituer, raison pour laquelle la société tessinoise a besoin de cette matière. Quant à savoir si Premec continuera d'acheter du Boillat, Giorgio Pagani ne l'exclut pas mais constate toutefois qu'il y a peu de chances, «à moins d'un miracle». Mais il ne croit guère aux miracles. D'autant que pour l'instant, Swissmetal n'a toujours pas été capable de lui confirmer les commandes passées pour août et septembre. Et comme Swissmetal a maintenant fermé son usine pour trois semaines en laissant en plan ses clients...


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TSR - reportage au SIAMS du 11 mai 2006 - interview de MM. Lauener et Pagani

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